Rencontre avec un auteur libre: Pouhiou

Aujourd’hui, je vous présente un auteur très important pour moi. Il m’a inspiré beaucoup dans ma démarche d’écriture, dans le choix de donner mes œuvres, via le domaine public. Il a également écrit la préface de mon dernier livre, « salut, moi c’est Greg ». Une belle personne, comme on en voit peu. Aujourd’hui, je vous présente mon copain Pouhiou.

Peux-tu te présenter en quelques lignes ?

Salut, je suis Pouhiou, toulousaing de 35 ans passionné par les gens, le tricot, les mots, et plus généralement tout ce qui me titille le cervelet (oui : c’est sale \o/ !).

Je suis aussi un internaute ébaubi de voir que nous avons construit un (non-)lieu où les collaborations, les créations et les libertés nous font avancer à grands pas (et faire de grands pas de côté, mais je m’égare). Du coup, je suis très vite tombé dans la marmite de potion magique de Framasoft, qui m’emploie actuellement comme chargé de communication.

Maintenant que nous te connaissons un peu mieux, pourrais-tu présenter tes écrits ?

Oui, mais c’est protéïforme.
J’ai commencé par des nouvelles que personne n’a lues (pas même ma môman), des chansons, un scénar de court métrage qui n’a jamais été tourné (mais il le vit bien) : bref, comme tout le monde, j’ai fait mes armes.

Ce n’est que lorsque j’étais comédien que j’ai commencé à écrire des pièces de théâtre : personne ne m’offrait le beau rôle dont je rêvais, alors je me suis dis que j’allais me le construire. J’ai donc écrit Tocante (une comédie sur le deuil, la mort, le suicide), et AndroGame (un duo où un homme qui ne veut plus de sa bite l’échange avec un ang qui aimerait bien savoir ce que cela fait. Oui.)

Puis l’envie d’écrire a pris le dessus sur l’envie de scène, j’ai donc commencé à écrire un roman-feuilleton bloguesque, une histoire de télépathes, les Noénautes, qui vivraient parmi nous et tentent de déjouer un complot… Il y a trois tomes de cette série (#Smartarded, #MonOrchide, #Apolog) qui devrait en comporter huit mais…

… mais depuis plus d’un an je suis en jachère (après une période « YouTube » qui m’a physiquement et moralement essoré ^^). J’ai bien un roman pornographique (avec un Incube et un Furby), un truc hyper expérimental (entre le théâtre quantique et le roman parlé), ainsi que des idées pour le 4e tome des NoéNautes, mais je suis dans une de ces périodes où j’ingère des tonnes d’œuvres, d’idées, etc. et où rien ne sort… c’est assez reposant, je dois dire !

Quel est ton genre d’écriture de prédilection ?

Euh… l’humour ?

Techniquement, mes pièces de théâtre sont des suspenses comiques, mes romans de l’Urban Fantasy, mais j’ignore si j’ai un genre qui prévaut…

Ce qui m’intéresse, surtout, c’est d’entrer en connexion avec l’audience de ce que je fais. Pour cela, j’utilise beaucoup l’humour ainsi qu’une certaine recherche dans la forme, toujours liée au fond. Ainsi, j’ai adoré écrire mes romans à la 2nde personne, en tutoyant le lectorat et en lui donnant un rôle important dans la narration même.

En général, on me dit que mes écrits perturbent, parce que c’est pas « écrit comme d’habitude »… du coup, soit on laisse vite tomber, soit on se laisse (sur-)prendre.

Pourquoi as-tu choisi une alternative au droit d’auteurs classique et quelle licence utilises-tu ?

J’utilise la CC-0, afin d’élever mes œuvres dans le domaine public (vivant, du coup, vu que je suis pas mort depuis plus de 70 ans, d’après mon médecin).

En vrai, ce sont mes écrits qui m’ont imposé cela. C’est eux qui ont choisi. J’avais beaucoup de problèmes avec le concept de droits d’auteur, de « propriété » intellectuelle, ce genre de choses. En écrivant et publiant un roman comme un blog, tous les jours pendant 4 mois pour #Smartarded, je me suis rendu compte que plus je mettrais de barrières entre le lectorat et moi, plus je dévoyais ce qui s’écrivait car, dans son essence même, c’est fluide, sans barrière.

C’est un peu plus tard que je me suis rendu compte que ces droits d’auteur, ces protections (protections contre le lecteur et bénéficiant à l’industrie du livre), sont principalement l’expression de mes peurs. Je les mets et j’y tiens parce que j’ai peur : peur d’être un tel génie que tout le monde va vouloir me dévaliser, peur d’être un gros naze qui n’a aucune valeur donc il faut que je m’en colle une artificiellement (alors que toute personne qui écrit sait bien qu’on fait très rarement ça pour de l’argent…).

C’est bien gentil ces peurs mais ça ne parle que d’une chose : moi, moi, moimoimoi. Ça ne tient pas en compte la personne la plus importante : celle qui va passer 200-300 pages de sa vie à lire ce que je voulais lui partager. Alors, je me suis détendu du droit d’auteur : ça fait un bien fou !

Où peut-on trouver tes histoires hors Wattpad/Scribay ?

Principalement sur mon site (que je ne tiens plus à jour : je suis en jachère!) sur http://pouhiou.com , et mes romans sont aussi sur le site de mon éditeur https://framabook.org

Donnes-tu l’opportunité à tes lecteurs de te soutenir (financièrement ou autre) ? Si oui, quels systèmes utilises-tu ?

Plus trop maintenant, vu que je ne produis rien en ce moment. J’ai longtemps été adepte de « donner la liberté de payer », de soutenir financièrement, comme le dit Ploum. Du coup j’ai eu plein de boutons sur ma page don : paypal, carrot, flattr, ceci, cela. J’ai aussi fait plusieurs crowdfunding, car ils sont pour moi le moyen de proposer une expérience sociale autre, un lien particulier avec le public (demander aux gens d’acheter mon 2e roman en circuit court pour financer la distribution gratuite d’exemplaires du 1er, c’était juste génial !)

Lorsque j’ai fait ma chaîne YouTube, je me suis refusé à faire un Tipeee, je sais pas pourquoi mais cet aspect « publish or perish » et ce marketing du don m’angoissent.

Aujourd’hui, je crois que je favoriserais des solutions éthiques pour le don : Liberapay et les dons en G1, la monnaie du réseau Duniter… En même temps c’est facile à dire pour moi : même si j’ai survécu (à coups de jobs sous payés, de chômage et de temps partiels), j’ai toujours préféré ne pas dépendre de mes créations pour subsister. Et là, j’ai la chance d’être bien rémunéré par un employeur qui reconnaît et apprécie mon travail : du coup, maintenant, j’estime que c’est plutôt à mon tour de donner !

Hormis l’écriture de fictions, crées-tu d’autres œuvres artistiques sous licence libre ? (vidéo, jeu de rôles, peinture, dessin, etc.)

J’ai produit, écrit et joué mes pièces de théâtre, ainsi que les vidéos de ma chaîne YouTube (réalisées par Dany Caligula pour la saison 1, et Marlène Tajan pour la saison 2).

Sinon, en ce moment, je fais tellement de petites peluches et serre-tête en crochet que j’ai une boutique Etsy (PouhiouDoudou). J’adore les arts de la laine, j’y vois beaucoup de correspondances avec l’écriture. D’ailleurs, je me considère comme un tricoteur de mots.

Quels sont tes auteurs préférés, qui t’inspirent ?

Terry Pratchett, qui a décidé de rendre le monde plus intelligent par l’humour et le plaisir. Chuck Palanhiuck, qui va chercher dans les tréfonds de l’humain pour chacun de ses romans. Rostand et Prévert, qui ont bercé mon enfance (oui, je les ai lus tout pitiot!). Je te sors que mes grands classiques à moi, parce qu’il y en a des tonnes, en fait. Mais, fondamentalement, j’ai beaucoup lu, de tout, et beaucoup d’écrits peuvent me toucher ;).

Que conseillerais-tu à un jeune auteur qui hésite à déposer ses histoires sous licence libre ?

Je vais te surprendre : de ne pas le faire si il/elle ne se le sent pas ! C’est con, mais c’est une démarche pas anodine de confier ses œuvres au public, d’ouvrir un contrat explicitant « voici tes libertés avec cette œuvre, et voici ce que j’attends de toi en retour ».

Cela signifie aussi bien une grande confiance en l’autre (et donc en soi), ainsi qu’une indépendance importante : tu prends en main tes écrits, tu t’apprêtes à gérer tes droits, à ne pas les vendre à l’industrie culturelle qui va t’échanger tes libertés et celle de ton lectorat par du confort (et le confort, c’est confortable).

Si, par contre, l’idée te titille : prends simplement le temps de te renseigner ! Viens voir les autres auteurices qui libèrent leurs œuvres, parle, échange : tu sentiras bien vite si c’est une démarche qui te convient ou pas.

Voudrais-tu rajouter quelque chose, concernant ton art, ta vision de la culture, qui n’a pas été traité dans les questions précédentes ? (Tribune libre)

On pense souvent à soi quand on écrit quelque chose, c’est un acte tellement intime ! Néanmoins, je crois qu’on peut aussi, ensuite, penser à toutes les personnes qui nous ont inspiré, abreuvé de mots, d’idées et de joies. Sans ces personnes, nos écrits ne seraient pas les mêmes, car nous avons fait nôtre leurs mots.

Du coup, il ne faut pas oublier le plus grand risque qui guette toute personne qui écrit : celui d’être lu·e ! Un jour (peut-être même est-il déjà arrivé), vos écrits aussi inspireront de nouveaux créateurs, de nouvelles créatrices.

Perso, je crois que je n’apporte qu’une petite pierre à ce beau chemin foutraque et labyrinthique qu’on appelle notre culture. Alors, si je peux tout faire pour que mon caillou t’aide à avancer et poser le tien : parfait ! J’ai pas oublié les pavés des autres ni combien ils m’ont élevé.

Vous pouvez retrouver Pouhiou sur :

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