Avertissement: cette petite histoire est inspirée de faits réels. Que dis-je? Elle s’est belle et bien déroulée! Bien sûr, les événements ont été exagérés, sans aucune honte. Parce qu’une histoire sans strass ni paillette n’est pas une histoire. Elle est dédicacée à mon ami Pouhiou.
Il y en avait partout : des paillettes sur mon clavier, des paillettes dans mon café, des paillettes sur mon vieux parquet délavé. Partout, vous dis-je ! Dans les cheveux de mon gamin, sur cette nappe de table, qui bien sûr, n’est pas cirée et faite d’un coton dru, permettant à ces petits bouts brillants de s’y incruster. Tellement bien enracinés dans cette étoffe qu’il a fallu passer l’aspirateur plusieurs fois pour les déloger. J’ai passé plusieurs journées à balayer, à enlever ces satanées paillettes. Même encore aujourd’hui, alors qu’elles ont fait leur apparition il y a plusieurs semaines, il m’arrive encore d’en retrouver. Pourtant, je suis sûr que cette enveloppe n’en contenait qu’une pincée.
Vous devez vous demander pourquoi je parle de ces satanées poussières brillantes. Veuillez m’excuser, à cause de l’émotion, je me suis quelque peu égaré. Tout a commencé avec un financement participatif. Oui, vous avez bien lu. Un ami-collègue auteur, Pouhiou, a lancé une campagne pour financer ses vidéos. J’aime bien ce qu’il crée, je trouve que ces messages sont importants, même si je ne suis pas le premier concerné par le sujet. Alors, j’ai voulu contribuer. Pour qu’il puisse continuer l’aventure. Je ne savais pas que le taulier des noénautes, avec leur aide, avait préparé une attaque pour qui le soutiendrait. Je ne cherchais pas spécialement les contreparties, je voulais seulement donner. Peut-être est-ce la raison de son perfide geste : « il ne veut pas de mes cadeaux, alors on va l’assaillir de paillettes ! »
Quoiqu’il en soit, plusieurs semaines après avoir envoyé quelques piécettes sur la chouette qui hulule, je reçois une grosse enveloppe à la maison. Elle venait du Sud de la France. Il y avait une faute dans mon nom de famille. Bien que je sois sûr qu’il rétorquera que c’est parce qu’il a dû rédiger des centaines d’enveloppes (oui, l’attaque a été planifiée sur bien d’endroits de la francophonie), cette petite touche aurait dû me mettre la puce à l’oreille. Mais j’adore recevoir du courrier. Surtout que depuis l’avènement d’internet et des courriels, on en reçoit plus beaucoup. Tenir une enveloppe, lire une lettre écrite avec attention me procure une joie toute particulière. Même si je suis technophile, avoir une lettre me rend particulièrement fébrile. Ni une ni deux, je filais avec mon précieux à mon bureau pour ouvrir la boite au trésor, qui au final, s’avéra une belle boite de Pandore.
L’attaque fut instantanée, me laissant coi pendant quelques instants. J’étais pris au dépourvu, ne sachant que faire. À peine ouverte, l’enveloppe laissa échapper une myriade d’étincelles multicolores qui se déversa sur mon petit bureau de bois antique, venant de mon grand-père, auquel je porte une attention toute particulière. Sans que je puisse réagir, ces poussières se répandirent. Elles s’incrustèrent dans le clavier de mon ordinateur portable, empêchant certaines touches de fonctionner. Elles s’immiscèrent dans mon café fraîchement torréfié. Ne le remarquant pas de suite, à la première gorgée, elles vinrent se lover dans ma jeune moustache que j’avais grand peine à faire pousser.
Lorsque mon hébétude fut dissipée, je constatai l’ampleur de la catastrophe. Les nuées continuaient leur progression, se disséminant dans tous les recoins possibles de mon appartement. Il me fallait vite réagir : dans quelque moment, le petit chérubin, certainement un complice de l’attaque, allait revenir. Elles continueraient, grâce à son précieux concours, à se répandre dans toute la maisonnée.
Luttant contre la panique, les genoux flageolants, il me fallait limiter au maximum les dégâts et me lançai dans une vaste opération de nettoyage. Car le pire était encore à craindre : en cas de poussières excessives, les coups de rouleau à tarte se mettraient à pleuvoir si les mirettes de la maîtresse de maison les apercevaient. Mais, à mon grand malheur, j’eus beau frotter, balayer, récurer, ces vicieuses petites paillettes continuaient leur avancée. Alors que je pensais un coin débarrassé, elles y venaient à nouveau me narguer.
Le désespoir m’envahit, je n’arrivai point à contenir l’invasion colorée. Les paillettes se collèrent à ma peau, impossible de les déloger. Mes vêtements en étaient remplis, faisant de Greg une pâle imitation d’un sapin de Noël de kermesse. La fureur, en même temps que mon impuissance, grandissait en moi. Il fallait que je trouve une parade, que je contre-attaque, car comme le dit si bien l’adage : la vengeance est un plat qui se mange avec des paillettes.
Les jours passèrent, se ressemblant tous, un peu comme dans ce film avec Bill Murray qui revit encore et toujours la même journée. Je passai balai et aspirateur, traquant la vermine brillante, que je n’arrivais pas à déloger. Même encore à l’heure actuelle, quelques semaines plus tard, je n’ose point toucher l’enveloppe et son contenu : des résidus trompent toujours ma vigilance et vont se lover dans les poils bien douillets de mes petits chatons. Et comme je passe beaucoup de temps à les caresser, je devins moi-même vecteur involontaire de propagation.
À force d’astiquer parquets carrelages et tapis, mon esprit fulmina. La vengeance prit doucement forme dans mon esprit. Il m’avait balancé une grenade ? Je lui renverrai un Tomahawk ! Je devais justement lui livrer un courrier, l’occasion était toute trouvée.
Pouhiou avait collaboré à mon dernier ouvrage, racontant les déboires du Greg dans sa lointaine jeunesse, en y écrivant la préface. Pour le remercier, je voulais lui envoyer un exemplaire de ce beau petit livre. Je vais donc, une fois que j’aurais consigné mes mémoires dans ce document, m’atteler à la tâche : il n’aura pas une pincée, il en recevra des poignées ! Mais mon esprit perfide, sadique sourit. Car il en répandra bien plus quoi qu’il arrive. J’en insérerai entre chaque page du livre, dans l’enveloppe, entre chaque feuille de papier de mon courrier. Chaque fois que le livre sera ouvert, une myriade de poussière argentée et dorée se répandra. Le tomahawk ultime et imparable.
Je n’ai pas peur du prochain coup, car je suis certain qu’il rétorquera à son tour. Nous sommes les instigateurs des Paillettes Wars. J’ai déjà prévu le coup suivant : « la bombe à pailleto-neutron ». Tout est fin prêt, je n’ai plus qu’à aller acheter les ingrédients de mon colis piégé. Mais avant, je vais devoir ressortir mon balai : quelques points brillants à ma droite heurtent la sensibilité de mon petit œil…
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Image de Frankieleon sous licence CC BY pour la vignette et de Sarah R Photography sous licence CC BY-ND pour le billet